La progression, toute une histoire !

Découvrir les arts martiaux n'est pas toujours une mince affaire ! On remonte les manches et c'est parti, ce n'est pas pour rien que le courage est le symbole de la ceinture blanche !

Rassurez-vous, c'est à la portée de tous ! En résumé, notre vision martiale moderne a une approche qui complète un cours traditionnel d’arts martiaux pour privilégier l’individu. En effet, nos programmes établissent des échelons progressifs. Ils référencent des socles communs de compétences évoluant suivant son expérience. Ce système cherche alors à respecter et accroitre les ressources propres à l’élève, tant sur le plan moteur (coordination et dissociation), bio-mécanique (efficience dans le placement), bio-physiologique (renforcement, souplesse, acrobaties), bio-informationnel (traitement de l’information pertinente) et psycho-affectif (gérer ses émotions).

En effet, l’exemple typique des projections le montre bien, le système est construit plutôt pour celui qui subit la technique (uke) que celui qui exécute la technique (tori), afin de tenir compte des appréhensions liées à la chute. Savoir chuter et accompagner le partenaire devient donc un prérequis. Les exercices éducatifs complémentaires pour éclairer une technique (hojo-undo) sont innombrables, selon les difficultés à franchir. Croyez-moi, c'est de plus en plus enrichissant, car chaque élève est différent ! Après une dizaine d'années d'enseignement, je m’attache à un fonctionnement prépondérant : tout le monde doit trouver sa place et y trouver son compte, une personne n’ayant fait aucune activité sportive de sa vie, une autre venant simplement pour le loisir ou encore un athlète à la recherche d’une performance physique. Chacun doit être en mesure de constater sa progression et les opportunités de s’épanouir ne manquent pas !

L’étiquette (rei-ho) a une réelle importance, crée un fonctionnement sain et de bienséance dans un apprentissage martial. En bref, il s’agit de la manière dont on se doit d'agir au sein d'un dojo, un gage d'une certaine sécurité et du respect de l’autre, et ça fait toute la différence entre un très bon pratiquant et un excellent ! C’est d’ailleurs depuis le Moyen-Âge japonais qu’on utilise l’expression « technique et esprit sont un » (gishin-fuki).

Un étudiant (gakusei) a le devoir d’adopter une attitude juste (shisei) intégrant les concepts de valeurs physiques et mentales pour réussir son apprentissage martial. Le respect commence par les plus élémentaires principes de civisme : être disponible, à l’écoute, attentif, ponctuel, pratiquer avec bonheur, être sérieux, dynamique, et toujours donner le meilleur de soi.

L'unité Shin-Gi-Tai

Les valeurs martiales sont universelles, quel que soit l'art concerné. La valeur morale (shin), la valeur technique (gi) et la valeur physique (tai) sont indissociables, à tel point que Michigami Haku du Judo Kodokan (1912-2002) en fit le fer de lance de la première forme du judo. Il existe également la méthode des formes (ho-kei) : l’âme et le corps sont un (rei-niku-ichiniyo), la coopération et le partage (jita-kyoei), le cœur et la forme sont un (shin-gyo-ichi), pour prendre conscience que les arts martiaux sont bien plus qu’un sport ou un loisir. C’est devenu une passion essentielle dans ma vie personnelle, je m’emploie à l’utiliser au quotidien.

Lorsque l'on démarre les arts martiaux, il est vital d’avoir un esprit d’ouverture (shoshin), Vous serez sur la bonne Voie ! On appréciera toujours de vouloir apprendre avec d’autres pratiquants de la même génération d’apprentissage (dohai), ou de la même classe d’âge (dokyusei). Mais au final, ce sera avec les plus expérimentés, ou à l’inverse en aidant les autres que la progression dans l’art martial sera la plus ressentie !

A force de patience, de persévérance (nintai) et de détermination (shiki), l’expérience se crée en prenant du recul sur sa pratique. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, cela commence dès le début de sa pratique ! On apprend d’abord en observant les autres (mitori-geiko), le principe de mimétisme est un bon point d’ancrage pour une évolution dans la bonne direction. Sa pratique martiale devient intelligente, lorsque l’on cherche à comprendre ce que l’on fait. D’ailleurs, je dis souvent à mes élèves avancés que ma pédagogie de transmission est bien plus qu’enseigner les arts martiaux : c’est leur apprendre à extérioriser le contenu, le fonctionnement, comprendre toute la mécanique corporelle, technique et morale. Cette transmission (den) se fait à partir de mon expérience personnelle et mon vécu (taiken). L’essence du savoir est qu’il y ait constamment des questions de l’élève et des réponses du professeur (mondo). Lorsque je n’ai pas de réponses, je fais l’effort de chercher à les trouver. Je pense qu’un bon professeur ne doit rien cacher de son savoir à son élève, il doit moduler sa transmission en fonction de l’expérience de son élève et de son état d’esprit. À travers les interrogations de l’élève, c’est également le professeur qui continue de s’instruire. En réalité, nous sommes toujours des éternels étudiants.

Do: la voie

J’affectionne énormément les cérémonies de réussite d’une nouvelle étape (gishiki). C’est un moment important, de discussion personnelle, dans la relation entretenue entre le professeur et son élève, dans le but de le remercier, de le recentrer et de focaliser ses objectifs propres. Le but à terme est de former des élèves devenus «  réellement capables » (jitsu-ryoku-gata) qui puissent montrer toute leur efficacité martiale (noritsu), autant sur le schéma corporel que sur l'état d’esprit. Au final, on veut « apprendre à se défendre » pour avoir confiance en soi, puis on finit par prendre conscience que ce que l’on veut vraiment c’est atteindre une sérénité, vaincre sans combattre (tatakawa-zushite-katsu). C’est en réalité, selon moi, le chemin (do) principal des arts martiaux : trouver la paix.

Kévin Renshi